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Giverny

Venez profiter des splendeurs automnales !

Tandis que s’égrènent les saisons, la Fondation Monet revêt des visages multiples. A l’instar du printemps et de l’été, l’automne recèle son lot de merveilles horticoles. Les bonnes raisons de visiter, en octobre, la maison et les jardins de Claude Monet foisonnent. Paroles d’experts !


 

«C’est l’automne. Les capucines ont envahi l’allée, et leurs fleurs multipliées à l’infini, plus éclatantes, ont dévoré le feuillage qui jaunit. A la féerie des pavots succède la féerie des fastueux dahlias ; collerettes tuyautées, précieusement liserées d’or fin, de pourpre saignante, de lilas attendris ; pompons imbriqués de toutes les couleurs vives et de toutes leurs nuances discrètes; étoiles qui tremblent et scintillent en haut des tiges frêles, ramifiées, charmantes de grâce légère et hardie ; ou bien, découpures de soies anciennes, aux tons atténués, aux broderies fanées délicieusement, ou bien, monstrueux panaches dont les pétales laciniés s’effilent, s’épandent, se tordent en crinières écarlates. A leurs pieds, les reines-marguerites développent la fraîcheur irradiante de leurs antiques fraises de dentelles; les antirrhinums lustrent le velours tigré, bicolore de leur masque de bêtes voraces ; les anémones du japon, avec des attitudes liturgiques, balancent leurs corolles sveltes et blanches ainsi que des cornettes ; les phlox sourient, candides corymbes, par la multitude de leurs petits yeux ingénus ; les glaïeuls retardataires étayent leurs somptueux calices, tendent leurs gorges liliales au vol énamouré des abeilles. Et, dans l’air empli de tous ces reflets, de tous ces frissons, de tous ces pollens, les vertigineux soleils tournent leurs disques jaunes, flambent et rutilent…»

Ces mots, publiés dans «L’Art dans les deux mondes» le 7 mars 1891, sont signés Octave Mirbeau. Ce familier de Claude Monet  y décrit avec finesse les merveilles automnales du sanctuaire givernois. Et l’écrivain n’est pas le seul à s’enthousiasmer pour cette fin de saison…

Jean-Marie Avisard, chef jardinier de la Fondation Monet : une atmosphère si particulière…

«Le mois d’octobre réserve aux visiteurs avertis toute sa palette d’automne ! Juste avant les premières gelées, les fleurs d’été sont à leur apogée et les asters resplendissent. Les liquidambars, saules pleureurs, hêtres -et j’en passe ! – déploient leurs flamboyantes couleurs. Quant à la brume qui se lève sur la Seine et enveloppe presque chaque matin le jardin d’eau, elle crée une atmosphère si particulière… A ne pas manquer !»

Sylvie Patin, correspondant de l’Institut (Académie des beaux-arts), conservateur général honoraire au musée d’Orsay : les chrysanthèmes, si chers au maître des lieux…

«Et le jardin, existe-t-il encore des fleurs ? Je voudrais bien qu’il y ait encore des chrysanthèmes à mon retour», confiait Monet dans une lettre qu’il adressait d’Étretat le 24 novembre 1885 à sa compagne Alice Hoschedé restée à Giverny. Un an plus tard, le 10 novembre 1886, alors à Belle-Île, Monet interrogeait encore Alice : «Dites-moi donc si les chrysanthèmes que j’ai semés fleurissent.»  Les jardiniers qui veillent aujourd’hui sur le jardin du peintre n’oublient pas la prédilection que ce dernier éprouvait pour les chrysanthèmes : ces fleurs colorées et décoratives, très à la mode au XIXe siècle, s’épanouissent avec éclat dans la douce lumière automnale à Giverny…

Philippe Piguet, historien et critique d’art, bel arrière-petit-fils de Claude Monet : une invasion si poétique…

« A l’automne, la jonction est accomplie : les deux rangées de capucines qui bordent de part et d’autre l’allée centrale du jardin de Monet se sont rejointes. Elles en recouvrent toute la surface en une invasion végétale du plus bel effet, empêchant tout passage. «La poésie n’est pas évasion, disait Cocteau, mais invasion». Une invasion qui se colore par ailleurs dans les reflets du bassin des plus beaux tons de jaune et de rouge dont la nature se pare à l’automne. Laissez-vous envahir. Par les yeux comme par l’esprit» 

Michel Bussi, romancier, auteur des «Nymphéas Noirs». La poésie en suspens…

«Il faut, aussi, visiter le jardin de Monet en automne. Il faut, aussi, visiter Giverny sous la pluie. Il faut, tel un peintre patient, guetter la fenêtre de lumière derrière le ciel fermé à double volet. Il faut voir briller les gouttes de soleil, il faut voir crever de mille larmes l’étang aux nymphéas, il faut voir les peupliers devenir squelettes, il faut voir les dernières couleurs se faner comme un pinceau que l’on rince, il faut y chercher le tableau que seul Monet voyait, même lorsqu’il n’y voyait plus. Des Nymphéas, sombres comme la mélancolie ; beaux comme la folie…»

Rémi Lecoutre, chef jardinier adjoint de la Fondation Monet : une émotion magnifiée…

«C’est avec force émotion que Claude Monet a façonné son sanctuaire. Et c’est cette même émotion que nous nous appliquons, aujourd’hui, à transmettre au visiteur. Visiter ce jardin, au-delà de la (re)découverte d’un lieu, c’est découvrir une aventure humaine, s’offrir un moment de rêve loin du train-train quotidien, s’évader et peut-être s’inspirer. Les jardiniers sont des grands curieux : ils veulent toujours savoir ce qui se passe ailleurs. Alors, ils offrent la plus grande palette végétale possible. La couleur rouge rebute certain(e)s ? Le fameux Persicaria/filiformis rassemble tous les suffrages ! Le jaune est une couleur banale ? Venez admirer les lumineux Helianthus rigidus. Ils instaurent une ambiance extraordinaire. Le bleu, c’est triste ? Alors, peut-être, ne connaissez-vous pas la Salvia uliginosa, moyennement rustique, il est vrai, sous nos latitudes. Elle offre pourtant avec une belle générosité des bouquets d’un bleu azuréen. Une teinte magnifiée sous nos ciels parfois encombrés de fin de saison. Cela serait sans doute fastidieux d’énumérer toutes les splendeurs que notre jardin offre. Donc, avant l’arrivée de l’hiver, accourez vite ! Et ne manquez pas la visite de la maison. Vous y vivrez un véritable voyage dans le temps où l’art pictural, l’Histoire et l’art des jardins se sont croisés …

Nicolas Obert, jardinier à la Fondation Monet et responsable du jardin d’eau : Des couleurs dignes d’une oeuvre impressionniste…

«En octobre, les plantes ont pris de la hauteur, les asters et les anémones sont en pleine floraison. Les couleurs d’automne se reflètent dans l’étang, donnant une nouvelle fois un agréable tableau à admirer…».